Publié le 15 mai 2024

En résumé :

  • Chaque type d’ordre (au marché, limité, stop) correspond à une intention précise : l’un privilégie la vitesse, l’autre la maîtrise du prix.
  • Le carnet d’ordres et la durée de validité sont des outils cruciaux pour éviter les mauvaises surprises et les prix d’exécution inattendus.
  • La gestion du risque, via le calcul de la taille de position (money management) et les ordres stop, est plus importante que la stratégie elle-même pour survivre en Bourse.
  • Les erreurs les plus fréquentes sont souvent psychologiques : impatience, surconcentration du capital et confusion entre épargne de précaution et capital d’investissement.

Vous êtes devant votre écran, le doigt suspendu au-dessus du bouton « Acheter ». L’excitation se mêle à une pointe d’appréhension. C’est un moment décisif, et vous n’êtes pas seul à le vivre. En 2024, plus de 216 000 Français ont acheté leurs premières actions, rejoignant le grand ballet des marchés financiers. Face à l’interface de votre courtier, une multitude d’options s’offrent à vous : « au marché », « à cours limité », « stop », « validité jour »… Un jargon qui peut sembler intimidant.

De nombreux guides se contentent de définir ces termes de manière technique. Mais ils oublient l’essentiel. Passer un ordre en Bourse n’est pas un simple acte mécanique ; c’est la **traduction d’une intention psychologique dans le langage de la machine**. Chaque clic, chaque paramètre que vous choisissez révèle votre rapport au risque, à la patience et à la discipline. Voulez-vous cette action à tout prix, et vite ? Ou êtes-vous prêt à attendre le « bon » prix, quitte à rater une opportunité ?

Cet article n’est pas une simple liste de définitions. C’est un guide de traduction. Nous allons décomposer ensemble chaque étape du passage d’ordre, non pas comme une contrainte technique, mais comme un choix stratégique délibéré. L’objectif : que l’ordre exécuté par la machine soit le reflet fidèle de votre plan, et non une source de mauvaise surprise. Vous apprendrez à dialoguer avec le marché pour qu’il respecte vos conditions, et non l’inverse.

Pour vous accompagner dans cette démarche, nous allons explorer méthodiquement les différents types d’ordres, décrypter le carnet d’ordres, identifier les erreurs classiques à éviter et enfin, assembler toutes ces pièces pour construire un système de trading complet et discipliné.

Ordre au marché, limité, stop : lequel choisir pour acheter ou vendre une action ?

Le choix du type d’ordre est la première et la plus fondamentale des décisions. C’est ici que vous traduisez votre intention principale. Votre message au marché est-il « Je veux cette action, maintenant, quel que soit le prix exact » ou « Je suis intéressé par cette action, mais seulement si elle atteint un prix que je juge juste » ? Chacune de ces phrases correspond à un ordre spécifique, avec ses avantages et ses inconvénients. Penser en termes d’intention plutôt qu’en termes techniques est la clé pour ne pas se tromper.

L’ordre au marché est le plus simple : il donne la priorité à la rapidité d’exécution. Il est idéal pour des actions très liquides (comme celles du CAC 40) où l’écart de prix est minime, mais peut être risqué sur des valeurs moins échangées. L’ordre à cours limité, lui, privilégie la maîtrise du prix. Vous fixez un prix maximum d’achat ou un prix minimum de vente. C’est l’ordre de la patience. Par exemple, si vous voulez acheter 10 actions L’Oréal mais pas au-dessus de 355€, vous placez un ordre limité. L’ordre ne passera que si le marché accepte votre condition. Enfin, l’ordre à seuil de déclenchement (ou « stop ») est un ordre conditionnel, souvent utilisé pour protéger une position.

Pour clarifier la traduction de votre intention en ordre technique, le tableau suivant résume les caractéristiques de chaque option, comme le montre une analyse comparative des stratégies d’investissement.

Comparatif des trois types d’ordres de bourse
Type d’ordre Prix d’exécution Rapidité Risque de slippage Utilisation idéale
Ordre au marché Meilleur prix disponible Immédiate Élevé sur valeurs peu liquides Actions très liquides (CAC 40)
Ordre à cours limité Prix fixé ou mieux Variable Aucun Entrée patiente sur support
Ordre stop Déclenché au seuil Après déclenchement Possible après activation Protection du capital

Le carnet d’ordres : comment lire le « match » entre acheteurs et vendeurs en temps réel

Si passer un ordre est un message envoyé au marché, le carnet d’ordres est le meilleur moyen d’écouter sa réponse. C’est une fenêtre transparente sur le **dialogue entre acheteurs et vendeurs** pour une action donnée. Il se présente sous la forme de deux colonnes : à gauche (souvent en vert), les intentions d’achat avec les quantités et les prix proposés (le « bid ») ; à droite (souvent en rouge), les intentions de vente (le « ask »). La différence entre le meilleur prix d’achat et le meilleur prix de vente s’appelle le **spread** ou la fourchette de prix. C’est un coût implicite de transaction.

Pour un débutant, le carnet d’ordres peut ressembler à une cascade de chiffres incompréhensibles. Pourtant, il raconte une histoire. Une forte pression dans la colonne des acheteurs (des quantités bien supérieures à celles des vendeurs) suggère que le sentiment est haussier. À l’inverse, si les vendeurs sont plus nombreux et proposent des volumes importants, la pression est vendeuse. Sur des actions peu liquides, cet écart peut être significatif ; une analyse du carnet d’ordres sur le marché français a pu observer des spreads atteignant parfois 2€ à l’ouverture.

Vue macro d'un carnet d'ordres boursier avec profondeur de marché visualisée par des couches colorées

Attention cependant aux leurres. Un ordre d’achat massif de 50 000 actions peut apparaître pour faire croire à un support solide, avant de disparaître comme par magie juste avant d’être touché. C’est une technique de manipulation. Le carnet d’ordres est un outil puissant, mais il faut l’interpréter avec prudence. Il vous informe sur la liquidité (plus les volumes sont élevés, plus l’action est liquide) et sur la psychologie du marché à un instant T.

La validité de votre ordre : une option à ne pas négliger

Une fois le type d’ordre et le prix choisis, une autre question se pose : combien de temps votre intention doit-elle rester active sur le marché ? C’est le rôle de la **durée de validité**. L’ignorer, c’est prendre le risque de voir un ordre « zombie » se réveiller des semaines plus tard et s’exécuter dans des conditions de marché qui n’ont plus rien à voir avec votre analyse initiale. C’est une erreur classique mais potentiellement très coûteuse.

Il existe plusieurs options, mais les deux principales sont :

  • **Ordre « Jour » (DAY)** : C’est l’option par défaut. Votre ordre est valable uniquement pour la séance boursière en cours. S’il n’est pas exécuté avant la clôture, il est automatiquement annulé. C’est le choix de la prudence, idéal pour les stratégies de court terme.
  • **Ordre « Révocation » (GTC – Good ‘Til Canceled)** : Votre ordre reste actif sur le marché jusqu’à ce que vous décidiez de l’annuler manuellement, ou jusqu’à ce qu’il soit exécuté. C’est l’outil parfait pour une stratégie patiente, par exemple pour viser un niveau de support technique sur plusieurs semaines ou mois.

Le danger des ordres GTC réside dans l’oubli. Un trader débutant peut placer un ordre d’achat à révocation sur une action, puis ne plus suivre le dossier. Si une mauvaise nouvelle fait chuter le cours des semaines plus tard, l’ordre peut s’exécuter et faire entrer l’investisseur sur une valeur en pleine déroute. L’histoire d’un trader ayant perdu 1 200€ en 3 jours sur un ordre oublié sur Société Générale en 2011 illustre parfaitement ce piège. Il est donc crucial d’avoir un suivi rigoureux de ses ordres en attente. Notez également que certains courtiers limitent la durée des ordres GTC (par exemple à 365 jours) et peuvent les annuler lors d’opérations sur titres (dividendes, divisions d’actions).

Les 5 erreurs de débutant qui peuvent vous coûter cher en passant un ordre

La technique est une chose, la psychologie en est une autre. Les pertes en Bourse sont rarement dues à un mauvais clic, mais plutôt à une série de biais cognitifs et d’erreurs de jugement. Une étude de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) de 2014, bien que datant un peu, reste édifiante : elle révélait une perte moyenne de 18 741€ pour les traders très actifs sur une longue période. Cela souligne à quel point la discipline est cruciale. Voici les erreurs les plus communes à éviter absolument.

  1. Multiplier les transactions (overtrading) : Penser qu’il faut être actif pour gagner est une illusion. Chaque ordre engendre des frais (courtage, spread) qui grignotent votre capital. L’impatience est votre pire ennemie.
  2. Concentrer excessivement son capital : Mettre 50% ou plus de son portefeuille sur une seule action est une recette pour le désastre. L’exemple de l’action Atos, qui a fait perdre jusqu’à 90% à de nombreux investisseurs entre 2021 et 2023, est un rappel brutal de ce risque. Une bonne diversification implique d’avoir au minimum 8 à 10 lignes différentes, aucune ne dépassant 15% du total.
  3. Investir son épargne de précaution : L’argent placé en Bourse est de l’argent dont vous ne devez pas avoir besoin à court terme. L’histoire de Sophie est tragique et instructive : ayant investi 22 000€, elle a été forcée de vendre en pleine panique COVID avec une perte de 35% (7 700€) pour payer une réparation de voiture imprévue.
  4. Ignorer les horaires de cotation : Passer un ordre « au marché » pendant les phases de pré-ouverture ou de pré-clôture sur Euronext (les « fixings ») est extrêmement risqué. La liquidité est faible et vous vous exposez à être exécuté à des prix totalement aberrants.

Ces erreurs ont un point commun : elles résultent souvent d’une décision émotionnelle (avidité, peur, précipitation) plutôt que d’un plan rationnel. Les éviter est la première étape vers une performance durable.

Le « slippage » : pourquoi le prix exécuté n’est pas toujours celui que vous aviez visé

C’est l’une des frustrations les plus courantes du trader débutant : vous visez un prix, vous cliquez, et le prix d’exécution final est légèrement différent. Ce phénomène s’appelle le **slippage**, ou « glissement ». Il représente l’écart entre le prix attendu d’un ordre et le prix auquel il est réellement exécuté. Le slippage n’est pas une erreur de votre courtier ; c’est une caractéristique intrinsèque des marchés financiers, surtout lorsqu’ils sont rapides ou peu liquides.

Le slippage se produit principalement avec les ordres au marché. Quand vous envoyez un tel ordre, vous demandez une exécution immédiate au meilleur prix disponible. Mais entre le moment où vous cliquez et celui où l’ordre arrive au serveur de la Bourse (quelques millisecondes), le prix a pu bouger. Sur un marché très volatile ou sur une petite action avec peu d’acheteurs et de vendeurs, cet écart peut être notable. C’est le **coût de l’impatience** et de l’exigence de rapidité. Le slippage peut être négatif (vous achetez plus cher ou vendez moins cher que prévu) ou positif (vous obtenez un meilleur prix).

Visualisation abstraite du slippage en trading avec décalage entre prix visé et prix obtenu

La meilleure arme contre le slippage négatif est l’ordre à cours limité. Avec lui, vous fixez votre prix « plancher » ou « plafond », interdisant toute exécution à un cours moins favorable. Fait intéressant et contre-intuitif, d’après les données FXCM pour l’année 2024, les ordres limités ont même plus de chances de bénéficier d’un slippage positif que les autres types d’ordres. C’est la récompense de la patience : non seulement vous contrôlez votre prix, mais vous pouvez même être agréablement surpris.

Stop loss, take profit : les ordres intelligents pour automatiser votre discipline

Si la stratégie et l’analyse vous aident à décider quand entrer sur le marché, les ordres intelligents comme le **stop loss** (SL) et le **take profit** (TP) décident pour vous quand en sortir. Ce sont les piliers de votre **architecture de discipline**. Leur rôle est de protéger votre capital et vos gains de votre pire ennemi : vos propres émotions. Décider avant même d’entrer en position à quel niveau vous accepterez une perte (stop loss) et à quel niveau vous prendrez vos bénéfices (take profit) est la marque d’un investisseur méthodique.

Le stop loss est un ordre de vente qui se déclenche automatiquement si le cours de l’action atteint un certain seuil de perte que vous avez prédéfini. C’est votre filet de sécurité, le **contrat de confiance que vous passez avec vous-même** pour couper une position perdante avant que la situation n’empire. Le take profit est son jumeau : un ordre de vente qui sécurise vos gains lorsque l’action atteint votre objectif de cours. Ces outils forcent la discipline en exécutant votre plan, même si la peur ou l’avidité vous incitent à faire autrement.

Il est cependant crucial de comprendre leurs limites. Comme le souligne un guide d’IG France, un stop loss classique n’est pas une garantie absolue. En cas de forte volatilité ou d’un « gap » (un saut de cotation, souvent à l’ouverture), le prix d’exécution peut être moins bon que votre seuil. C’est le slippage dont nous parlions.

Les stops ne clôturent pas toujours votre position au niveau défini. Le marché peut passer d’un cours à un autre sans activité intermédiaire, notamment durant la nuit ou le week-end. C’est le slippage. Les stops garantis clôturent automatically au niveau prédéfini.

– IG France, Guide sur les erreurs de trading

Pour des stratégies plus dynamiques, des outils comme le « trailing stop » (stop suiveur) peuvent être utilisés. Ce dernier remonte automatiquement votre seuil de stop loss à mesure que le cours monte, permettant de sécuriser une partie des gains tout en laissant la position profiter d’une tendance haussière, une technique efficace sur des valeurs comme Hermès ou L’Oréal.

Le « money management » : l’art de dimensionner vos positions pour survivre et prospérer

Vous pouvez avoir la meilleure stratégie du monde, si vous gérez mal la taille de vos positions, vous finirez par perdre. Le **money management** est l’art de déterminer combien de capital allouer à chaque trade. C’est sans doute la compétence la plus critique pour la survie à long terme en Bourse. L’objectif n’est pas de ne jamais avoir tort, mais de s’assurer que lorsque vous avez tort, la perte est si petite qu’elle n’affecte ni votre capital, ni votre moral.

La règle la plus célèbre et la plus saine est la **règle des 1%**. Elle stipule que vous ne devriez jamais risquer plus de 1% de votre capital de trading total sur une seule position. Si votre capital est de 10 000€, votre perte maximale acceptée sur un trade doit être de 100€. Ce n’est pas la somme investie, mais bien la perte potentielle (la distance entre votre prix d’entrée et votre stop loss) qui est limitée. Cette règle vous protège mathématiquement : il faudrait des dizaines de trades perdants consécutifs pour anéantir votre compte, un scénario hautement improbable.

Le calcul de la taille de votre position devient alors un exercice simple mais fondamental. Il vous force à définir votre stop loss *avant* d’entrer, ce qui est une excellente habitude. Il vous empêche de tomber amoureux d’une action et de surinvestir dessus. N’oubliez jamais d’inclure les frais cachés dans votre calcul de rentabilité. Un trader très actif peut voir sa performance anéantie par les commissions, le spread et le slippage, qui peuvent représenter des milliers d’euros par an.

Votre plan d’action : calculer votre taille de position avec la règle des 1%

  1. Déterminez votre capital de trading : Listez la somme totale que vous allouez à l’investissement (ex: 10 000€).
  2. Calculez votre risque maximum par trade : Prenez 1% de ce capital (ex: 100€). C’est votre perte maximale autorisée.
  3. Identifiez votre point d’entrée et votre stop loss : Fixez le prix auquel vous achetez et le prix auquel vous couperez vos pertes.
  4. Calculez la taille de la position : Appliquez la formule : Nombre d’actions = Risque max / (Prix d’entrée – Prix du Stop loss).
  5. Validez la cohérence : Assurez-vous que le montant total de la position (Nombre d’actions * Prix d’entrée) respecte vos règles de diversification.

À retenir

  • Le choix de votre type d’ordre est une déclaration d’intention : l’ordre au marché privilégie la vitesse, l’ordre limité la maîtrise du prix.
  • Le money management, en particulier le calcul de la taille de position pour ne risquer qu’un faible pourcentage de son capital, est plus crucial que la stratégie elle-même.
  • L’automatisation de la discipline via les ordres stop loss et take profit est le rempart le plus efficace contre les décisions dictées par la peur ou l’avidité.

La performance en trading n’est pas qu’une question de stratégie, c’est un système complet

Au terme de ce parcours, une vérité essentielle se dessine : la réussite en Bourse ne repose pas sur un « coup » de génie ou une stratégie secrète. Elle est le fruit d’un **système cohérent et discipliné**, où chaque élément, du choix de l’ordre au calcul du risque, s’emboîte logiquement. La performance est une conséquence, pas un objectif premier. L’objectif est l’exécution parfaite et répétée de votre système.

Ce système repose sur plusieurs piliers que nous avons explorés. Il commence par une **thèse d’investissement claire** (Pourquoi j’achète cette action ? Quel est mon horizon de temps ?). Il se poursuit par la traduction de cette thèse en un ordre technique adapté. Il intègre une gestion du risque non négociable, avec un money management strict et la mise en place systématique de stop loss. Enfin, il se conclut par le suivi et la documentation de chaque opération dans un journal de trading, pour apprendre de ses erreurs comme de ses succès.

Le choix d’un courtier régulé et fiable est la fondation de tout cet édifice. En France, les investisseurs bénéficient d’un cadre protecteur. Par exemple, le Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution (FGDR) offre une garantie sur les titres jusqu’à 70 000€ en cas de défaillance du courtier, un événement qui n’est d’ailleurs jamais arrivé pour un broker agréé par l’AMF depuis l’an 2000. Choisir un acteur reconnu, comme XTB qui prévoit un accès au PEA en 2025, est un gage de sérénité pour se concentrer sur l’essentiel : sa stratégie.

Vous avez maintenant toutes les cartes en main pour passer de spectateur intimidé à acteur éclairé. La prochaine fois que votre doigt survolera le bouton « Acheter », ce ne sera plus avec appréhension, mais avec la confiance que procure un plan bien défini. L’étape suivante consiste à formaliser votre propre checklist de passage d’ordre et à commencer à l’appliquer, même avec de petites sommes, pour bâtir votre expérience.

Rédigé par Alexandre Petit, Alexandre Petit est un analyste quantitatif qui a passé 8 ans à développer des stratégies de trading algorithmique pour des fonds d'investissement. Il se spécialise aujourd'hui dans la vulgarisation des approches systématiques pour les investisseurs individuels et les trésoriers d'entreprise.